A Alphonse Karr

Que de fois sous les tilleuls, Tous deux seuls Avec ma maîtresse blonde, Ton livre m'a fait songer, 5 Étranger A tout le reste du monde! Je m'alanguissais, à voir Son oeil noir, Et, me répétant: Je t'aime! 10 Sans songer au lendemain, Dans sa main Elle tenait le poëme. Oh! les charmants écoliers! Vous mêliez 15 Votre voix et votre haleine Et vos soupirs amoureux, Couple heureux, O Stéphen, ô Magdeleine! Tel, au mois couleur du jour 20 Où l'amour A la terre se marie, Au fond des vertes forêts Je pleurais Sur les genoux de Marie! 25 Telle Eunice emporte Hylas! Puis, hélas! Tout s'enfuit de la mémoire, L'oubli vient, puis le remord, Puis la mort, 30 C'est bien l'éternelle histoire. Il en est une autre aussi, Dieu merci! Douce à mon âme inquiète: Roméo tombe au printemps, 35 A vingt ans, Auprès de sa Juliette! Il sort par un beau matin Du festin, Plein de jeunesse et de sève, 40 Et meurt les yeux embrasés De baisers: Mais, celle-là, c'est le rêve! Mai 1855.

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