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Létourneau, Lorraine

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Repères bibliographiques

 
D'amours et d'aventures. Moncton: Éditions d'Acadie, 1996.
  Retracer sa généalogie, connaître l'histoire de sa famille et de son peuple, est important pour beaucoup d'Acadiens. Dans Pélagie-la-Charrette, Antonine Maillet a imaginé, sous forme romanesque, le retour des Acadiens après la déportation de 1755. Dans On revient toujours chez soi - Cocagne, Germaine Breau-Major a écrit l'histoire de ses ancêtres en lui donnant la forme d'un journal intime inventé. Lorraine Létourneau, ambitieuse, raconte dans une sorte de biographie romancée la vie de sept femmes de sa lignée maternelle, en remontant jusqu'au dix-septième siècle, époque à laquelle Michel Richard, dit Sans Soucy (ou Michel l'Arrivant), arrive de France à Port-Royal et y épouse Madeleine Blanchard en 1656. Commence ainsi le récit de cette famille à travers huit générations (l'auteure appartenant à la neuvième), raconté du point de vue des femmes, avec les naissances nombreuses, les voyages, les maladies, les enfants noyés, les mariages etc. Certaines lectrices seront probablement rebutées par le caractère répétitif de l'ouvrage substantiel (345 p.). Elles mettront aussi en question la représentation par trop romantique de l'amour conjugal qui, sauf chez un seul couple, reste passionné jusqu'à la mort. Cette passion ne convainc pas au niveau scriptural puisqu'elle est exprimée par les mêmes formules stéréotypées qui parsèment le texte (la quatrième de couverture n'hésite pas à affirmer que l'auteure raconte dans son livre «la saga de ces femmes Richard, qui ont vécu une grande histoire d'amour où la procréation était plus souvent l'expression de leur sensualité que l'accomplissement du 'devoir conjugal'»).
Si l'on fait abstraction de ces faiblesses stylistiques, il reste que ce roman à base historique réussit bien à mettre en scène les travaux quotidiens des femmes, la vie dure de tous les jours interrompue par la fête d'un mariage ou l'arrivée d'un membre de la parenté, la débrouillardise des femmes pendant les nombreuses absences du mari parti en voyage, en exploration des terres, ou en guerre. Le goût des aventures est mis en relief par les déplacements fréquents - de Port-Royal à Grand-Pré, aux Iles de la Madeleine, aux Iles Saint-Pierre et Miquelon, et à l'Ile d'Anticosti - voyages d'exploration d'une part, mais aussi entrepris par nécessité, pour trouver d'autres terres ou de meilleures pêches, pour se cacher des Anglais et de la menace d'être déporté. En effet, plusieurs membres de la troisième génération (du couple Pierre Richard dit le Pauvre et Marie Boudrot) ont connu la déportation: l'une de leurs filles fut déportée au Connecticut, l'autre en Louisiane, un de leurs fils à Belle-Ile-en-mer, deux autres s'installent à Saint-Malo; Anne-Agnès Poirier, fondatrice de la quatrième génération de par son mariage avec Joseph Richard en 1751, fut déportée quatre fois. La partie expliquant la dispersion des Acadiens est intéressante à lire, tandis que le récit des diverses déportations manque de tension narrative et n'accroche guère les lecteurs et lectrices non-acadien.ne.s qui ne sont pas marqué.e.s par le souvenir de ce traumatisme collectif, fondateur de l'histoire des Acadiens.

 

 

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